Série Bâtiment Intelligent #11 : les infinies possibilités de la lumière connectée
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L’éclairage devient connecté, permettant de collecter de nombreuses données pouvant s’avérer très utiles dans la vie et la gestion d’un bâtiment… Explications avec François Darsy, expert Lighting chez Philips Lighting France.
Au-delà d’abriter nos activités, les bâtiments ont un rôle particulier : ils reflètent nos modes de vie, nos organisations et accompagnent les mutations sociétales. Au 21 e siècle, de fait, nos bâtiments représentent une part significative de notre impact environnemental et un enjeu majeur de la transition écologique. Les bâtiments sont aussi un produit d’épargne à long terme, toujours perçu comme l’un des plus stables et des plus sûrs, car « rien ne remplace la pierre ». L’irruption, récente au regard de l’industrie immobilière, du digital dans notre société pose plusieurs questions sur l’évolution des bâtiments. Le numérique propose en effet une transition vers l’économie de partage (Airbnb, Uber, WeWork…) qui revisite la chaine de valeur et les modèles d’entreprises. Il redonne aussi une place centrale à l’expérience utilisateur en favorisant la simplicité des concepts, la facilité d’usage, la richesse des contenus et l’adaptation permanente du service au besoin. Les objets qui nous entourent et avec lesquels nous vivons se connectent progressivement : nos téléphones, nos voitures… L’usage de nos bâtiments n’échappera pas à a ce mouvement de fond.
Éclairage connecté : une mine de données
En parallèle de cette transformation digitale, l’industrie de l’éclairage vit une autre révolution technologique liée à l’irruption de la technologie LED. La transition LED permet des gains très significatifs sur la consommation d’énergie (de 50 à 80 %), mais le changement des luminaires est aussi une opportunité de placer des luminaires connectés. Ces derniers deviennent un élément de réseau qui peut collecter des données sur l’usage de l’espace qu’il éclaire comme délivrer des services et de la connectivité aux usagers de cet espace. Ainsi, les entreprises peuvent à leur tour analyser, extraire et agréger ces données afin d’obtenir de nouvelles informations sur le fonctionnement des systèmes et l’activité des individus au sein des espaces éclairés.
La grande innovation de ce système est qu’en éclairant un espace, on déploie en même temps un réseau informatique qui par analogie représente l’ossature du futur bâtiment intelligent sur lequel viendront converger tous les usages et toutes les fonctions. L’éclairage étant par nature présent dans tous les espaces du bâtiment et de façon très dense et très homogène, il forme un réseau idéal ! Les luminaires connectés sont ainsi conçus pour mettre à disposition les informations qui les concernent dans des formats de données standardisés accessibles à tout prestataire de service potentiel. Ces informations peuvent notamment se rapporter au niveau de gradation, à la consommation énergétique, aux périodes d’occupation des espaces, ou encore à des mesures de températures intérieures. Plus les données à disposition des gestionnaires sont précises, plus ils peuvent optimiser l’usage de leur bâtiment.
Espaces connectés : des environnements optimisés
Ce n’est pas un hasard si les réseaux des capteurs peuvent jouer aujourd’hui un rôle essentiel dans l’Internet des objets (IoT). Les capteurs peuvent collecter des données sur l’activité humaine (circulation dans les pièces empruntées, habitudes d’utilisation, préférences), l’environnement (niveaux de lumière naturelle, température, humidité, présence de produits chimiques ou d’autres dangers), ainsi que d’autres types de données (emplacement des articles dans un entrepôt, habitudes de circulation). Les systèmes d’éclairage connectés servent de plateformes aux réseaux de capteurs. En dotant le système d’éclairage de capteurs, on bénéficie d’une infrastructure idéale, évolutive et prête à l’emploi. En termes d’usage, un système d’éclairage équipé d’un capteur de présence permettra par exemple d’éteindre l’éclairage des espaces non utilisés. Il est ensuite souhaitable de partager cette information avec les autres éléments techniques du bâtiment pour par exemple décider si un bureau doit être réchauffé ou refroidi permettant d’offrir un meilleur confort et de réaliser aussi des économies d’énergie plus importantes. Au-delà de la technique, on peut aussi partager cette information avec le prestataire de ménage pour qu’il puisse adapter sa tournée régulière dans le bâtiment en fonction de l’usage réel, rien ne sert de nettoyer des pièces sous utilisées ! À l’inverse, il est parfois nécessaire d’avoir recours à des ressources supplémentaires en cas d’usage intensif ponctuel. Cette seule optimisation a été évaluée à 1€/m²/an pour le bâtiment the Edge à Amsterdam.
Le bâtiment The Edge à Amsterdam, intègre pas moins de 6 000 luminaires Leds équipés de capteurs capables de détecter les mouvements, la température, etc.
La donnée d’occupation des espaces est aussi un formidable outil de gestions des espaces. Par exemple, 20 à 30 % des réunions planifiées n’ont pas lieu et certaines réservations de salles ne sont pour autant pas annulées. Cela conduit à des pénuries non justifiées de salles. En ayant accès aux données réelles de présence, il est possible de libérer des espaces non utilisés et de fluidifier l’accès réel aux espaces de réunion. De même, les données d’occupation de chacun des postes de travail permettent d’optimiser la gestion de l’espace en introduisant des usages nouveaux du type flex office.
Connecter les collaborateurs par la lumière
L’émergence de la technologie LED permet un autre cas d’usage totalement nouveau et disruptif : la transmission de données par la lumière. Sans entrer en détail dans la technologie du Li-Fi, il est possible de moduler l’intensité lumineuse de nos luminaires pour qu’elle transporte des données comme cela est fait dans les fibres optiques. Se connecter à Internet par la lumière nécessitera des équipements personnels spécifiques qui n’existent pas encore (smartphone, tablette, …). Pour autant avec les appareils existants, il est d’ores et déjà possible d’utiliser les luminaires comme des balises lumineuses qui vont indiquer aux équipements mobiles leur position avec une précision inégalée (< 1 m). Cette technologie est appelée VLC pour Visible Light Communication et constitue un véritable GPS indoor sans infrastructure supplémentaire. D’une façon générale, la géolocalisation dans un bâtiment complexe va faciliter son usage pour tout le monde. Ce positionnement par la lumière va enfin permettre de construire toute une palette de services virtuels dans un contexte physique précis. Par exemple, si l’on pilote son éclairage ou son chauffage par smartphone, grâce à la géolocalisation, le système saura sur quels appareils agir. Cela va également servir aux prestataires extérieurs de services pour leur indiquer leur lieu d’intervention et suivre leur prestation dans le bâtiment. Ou encore faire livrer des colis ou un repas à un collaborateur directement là où il se trouve. Enfin, la géolocalisation va guider les salariés les uns vers les autres ou vers les ressources disponibles (salles de réunion, etc…). Les modes de travail évoluent inéluctablement vers plus de mobilité, nous changeons régulièrement d’espaces de travail, il est donc important d’accompagner cette évolution avec des outils qui vont faciliter la vie des collaborateurs.
Au-delà de l’occupation des espaces, l’éclairage est une infrastructure omniprésente dans nos espaces de vie et en particulier nos espaces de bureaux qui va permettre de collecter toute une variété de données en temps réel (température, qualité de l’air, bruit, …) et d’interconnecter tout un panel d’équipements. Les possibilités des services et de la valeur potentielle de la donnée sont immenses et encore largement sous exploités. Le meilleur est à venir, dès lors que l’on a la bonne infrastructure !
François Darsy est expert en « smart lighting » pour les marchés tertiaire, industrie et logistique chez Philips Lighting France.
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